lundi 16 mars 2009

RFI: La Francophonie littéraire, le tournant ?

Lu sur le site de Radio France Internationale du 13/03/2009 (extrait) :

La Francophonie littéraire, le tournant ? par Tirthankar Chanda

Alain Mabanckou, chef de file du mouvement Littérature-monde en français, est-il en train de faire bouger les lignes dans l’univers des Lettres françaises ? De plus en plus d’ouvrages francophones sont primés en France – signe que l’on reconnaît aujourd’hui plus volontiers l’importante contribution de ces auteurs d’outre-France à l’élargissement des frontières de l’imaginaire littéraire français.
Littérature francophone ou littérature-monde en français ? La question secoue l’univers de la francophonie littéraire depuis bientôt deux ans. «Pendant longtemps, ingénu, j’ai rêvé de l’intégration de la littérature francophone dans la littérature française, écrit Alain Mabanckou, chef de file du mouvement Littérature-monde en français. Avec le temps, je me suis aperçu que je me trompais d’analyse. La littérature francophone est un grand ensemble dont les tentacules enlacent plusieurs continents. (...) La littérature française est une littérature nationale. C’est à elle d’entrer dans ce grand ensemble francophone.»

Une «variante exotique tout juste tolérée»
La révolte grondait depuis longtemps, mais elle a éclaté au grand jour en mars 2007. Elle a pris la forme d’un manifeste, signé par un collectif de 44 écrivains, avec à leur tête Michel Le Bris, le fondateur du festival Etonnants voyageurs. Le Manifeste des 44, relayé par un livre paru 3 mois plus tard, réunissant 27 textes-professions de foi, proclame l’émergence d’une littérature de langue française transnationale qui marque, selon ses signataires, la fin de la francophonie héritée de l’empire colonial français, trop empreinte d’un paternalisme révolu. Comme modèle, le collectif cite la nouvelle littérature anglaise, prise d’assaut par les enfants de l’ex-empire britannique, alors que les institutions littéraires françaises tiennent les écrivains francophones en marge, une «variante exotique tout juste tolérée».
Les auteurs s’élèvent aussi contre une vision trop politisée qui avait provoqué, en 2006, à l’occasion du Salon du Livre de Paris ayant pour invitée la Francophonie, un vif débat à propos de l’invitation de l’un des meilleurs romanciers algériens, Boualem Sansal, au motif que son pays n’était pas membre des instances officielles de la Francophonie. Finalement, Boualem Sansal fut bel et bien invité et délivra une séance de dédicaces sur le stand de la Francophonie.
Parmi les signataires du Manifeste, on trouve quelques-unes des grandes figures des littératures francophones – Nancy Huston, Tahar Ben Jelloun, Amin Maalouf, Alain Mabanckou, Abdourahman Waberi... –, mais aussi des écrivains français influents tels que Jean-Marie Gustave Le Clézio, prix Nobel de littérature 2008, Eric Orsenna, Jean Rouaud et quelques autres.
Cette solidarité des hommes et des femmes de la plume traduit, au-delà de la ligne de fracture français-francophone, une nouvelle étape dans la réorganisation des Lettres de langue française. Francophones et Français se reconnaissent dans ce concept de littérature-monde tandis que les institutions de la Francophonie – malgré des efforts dont l’un des plus notables est la remise du Prix des cinq continents, ouvert à tous les écrivains de langue française d’où qu’ils viennent – peinent à réunir sur un même plateau les deux tribus. D’où la question «qui tue» : pourquoi la littérature française n’est-elle pas considérée comme une littérature francophone parmi d’autres ?

Ne pas confondre francocentrisme et francophonie
Une question que se pose aussi Abdou Diouf, secrétaire général de la Francophonie, lorsqu’il s’interroge dans une lettre ouverte aux partisans de la fin de la francophonie: «A la tête de l’Organisation de la Francophonie depuis quatre ans, je ne parviens toujours pas à m’expliquer, ni à expliquer aux francophones militants sur d’autres rivages, le désamour des Français pour la francophonie.»

La suite sur :
http://rfi.fr/actufr/articles/111/article_79194.asp

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